Mort du prix Édouard Glissant à l’université de Paris 8 (2002-2017)
Le prix Édouard Glissant avait été fondé par l’université de Paris 8 en 2002. Il avait une double mission : honorer des écrivains, créateurs et penseurs et attribuer une bourse à des doctorants qui mettent en valeur la mondialité, l’échange, la différence, la créolisation, notions chères au poète philosophe. Cet esprit correspondait à l’université-monde qu’est Paris 8, dans la continuité de Vincennes, dont les présidences ont toujours soutenu ce prix. Son jury, alliant la diversité disciplinaire et la rigueur intellectuelle, était présidé, ces dernières années, par notre collègue Françoise Simasotchi-Bronès, la spécialiste des littératures et pensées créoles dans notre université. Parmi les lauréats du prix ont figuré notamment Boualem Sansal, Nurith Aviv, Souleymane Bachir Diagne, Claudio Magris…
En 2018, les membres du jury ont accepté que l’Université Paris Lumières (UPL) en prenne la responsabilité avec l’objectif de l’élargir à toutes ses institutions partenaires. Soucieux de respecter les règles d’impartialité, son Conseil Académique n’a pas souhaité que l’Institut du Tout-Monde soit associé au jury. Depuis le décès d’Édouard Glissant en 2011, les agissements de cette association qui n’a jamais honoré ses promesses à l’égard du prix l’ont rendue incompatible avec la déontologie universitaire. Outre ses campagnes de calomnies menées contre plusieurs universitaires — la dernière en date motive actuellement une plainte en diffamation par le président du Comité National pour la Mémoire et l’Histoire de l’Esclavage contre le directeur de son site internet —, elle impose ses partis pris, sans l’aval des ayants droits moraux de l’écrivain. Depuis la mort de son fondateur, l’ITM a donc perdu sa légitimité.
Pour l’édition 2018, contre toute attente, Françoise Simasotchi-Bronès n’a pas été reconduite comme présidente du prix. C’est Fabienne Brugère, la nouvelle présidente du Conseil académique qui en a pris l’autorité. Face aux pressions de l’Institut du Tout-Monde, cette dernière a d’abord tronqué l’édition du prix 2018 en ne procédant qu’à l’attribution de la bourse, reportant la remise du prix. Puis, sans aucune concertation ni transparence, dérogeant au règlement voté par le Conseil académique et approuvé par le Conseil d’administration, le prix et son organisation ont été cédés à l’Institut du Tout-Monde.
Non seulement l’UPL (et donc l’université de Paris 8) n’a plus de responsabilité dans ce prix, mais en plus elle donne sa caution universitaire à une association aux pratiques douteuses qui s’en targue désormais dans ses annonces. Les universitaires, au contraire, se trouvent brutalement trahis — particulièrement celles et ceux qui ont été au fondement de ce prix et en ont assuré la pérennité pendant 15 ans.
Le prix Glissant qui faisait honneur à notre université a été bradé à des intérêts particuliers.
Bruno Clément, professeur émérite de l’université de Paris 8, président du Conseil Académique de l’Université Paris Lumières jusqu’en septembre 2018
François Noudelmann, professeur à l’université de Paris 8, membre de l’Institut Universitaire de France